Complotisme Intégrisme. Que recouvre ce nouveau combat lancé par l’exécutif ?

Pour les puissants qui nous gouvernent, rien ne semble plus urgent que de lutter contre le complotisme et l’intégrisme. Le décor est bien planté dans la tribune publiée par Macron quatre jours avant Noël dans l’hebdomadaire l’Express :

« Le complotisme gagne du terrain et prend des formes de plus en plus extrêmes […] L’intégrisme religieux, et ses explications totalisantes qui privilégient la foi sur la raison, la croyance sur le savoir et excluent le doute constructif, devient de plus en plus prégnant ».


Pour discerner ce qui est visé, interrogeons-nous d’abord sur le vocabulaire. Le savoir ici se réfère à « la science » dont il est dit en préambule que jamais « l’humanité n’a en eu autant besoin ».  Mais, ce que la « science » recouvre pour notre président semble assez flou, aucune allusion à un quelconque processus de validation par l’expérimentation ou des observations reproductibles : pour lui comme pour la plupart des médias, on appelle « science » ce qui est admis par le consensus universitaire ou ce qui est publié dans des revues internationales (sans chercher à savoir par qui).


D’ailleurs, l’insistance sur l’antagonisme science/complotisme montre bien que, pour nos gouvernants, tout discours d’un universitaire choisi par le pouvoir politique sera paré du qualificatif de « scientifique » et ce qui n’est pas dans la bonne ligne sera considéré comme « complotiste ».
En fait, les véritables sciences caractéristiques de notre modernité – les sciences physiques, mathématiques et naturelles – se sont construites depuis des siècles grâce à des controverses et des remises en causes successives (parmi les premières, la remise en cause de la théorie aristotélicienne du mouvement aux XIV° et XV° siècles). On le sait, il ne suffit pas qu’une théorie scientifique soit adoubée par les autorités universitaires pour qu’elle soit recevable : de nombreux articles publiés dans des revues internationales prestigieuses contiennent malheureusement des erreurs ou, pire, des fraudes délibérées.
La lutte contre le complotisme, s’il elle annihile toute possibilité de controverses, risque de faire beaucoup de dégâts collatéraux !


Quant à l’emploi du mot intégrisme par le président, il y a de quoi s’interroger. En effet, ce terme était employé encore récemment uniquement dans les polémiques internes au catholicisme par les tenants de l’ouverture au monde à l’encontre des partisans du refus du modernisme ; mais les nouveaux clercs en affublent désormais tout chrétien pour qui la conscience morale est la référence suprême (ce qui permettra bientôt de faire un amalgame entre catholiques attachés à la Tradition et islamistes radicaux).
En opposant la croyance chrétienne et le savoir scientifique, le président fait sien le lieu commun selon lequel les avancées scientifiques se sont faites à l’encontre de la théologie ; alors que ces dernières ont éclos justement dans le creuset chrétien qu’était l’Université médiévale. Ainsi les grands savants du XVI° siècle que furent Vésale (le fondateur de l’anatomie) et Paracelse (le fondateur de la chimie) y avaient été formés et n’étaient nullement opposés au magistère de l’Eglise ; de même que Copernic qui conseillait le pape.


Pourquoi donc cette mise en scène du danger de l’intégrisme opposé à « la science » ?

Un des buts de cette lutte contre l’intégrisme au nom de « la science » transparait derrière une petite phrase de ce texte : « Il nous faut faire de la formation à l’esprit scientifique dès le cycle primaire. L’école ne saurait seulement instruire. Elle doit faire des républicains, c’est-à-dire forger des êtres informés et libres ». Bien qu’à la fin du primaire nombre d’enfants ne savent pas lire correctement, ni compter, il faudrait donc prioritairement faire de « l’éducation à l’information » ; cela risque d’aboutir concrètement à des séances de formatage où les seules informations présentées comme fiables seront celles provenant du service public. Mais finalement, ceux qui sont visés par l’auteur de cette tribune semblent bien être les catholiques à qui l’on reproche de ne pas être assez malléables – d’ailleurs il ne faut pas oublier que pour la puissance administrative l’École catholique et les établissements hors contrat restent des anomalies qu’il faudra absorber tôt ou tard dans un « grand service public ».

N’oublions pas que saint Jean-Paul II commençait son encyclique en 1998 par ces mots « La foi et la raison sont comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité » !

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